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Tourisme

L’avenir du transport aérien de passagers.

Portrait Gaillard Thierry

Thierry Gaillard - - modifié le

Cet article étudie un plan d’affaires qui pourrait émerger sous cinq à dix ans pour les compagnies aériennes, inspiré d’un célèbre moteur de recherche, basé sur la gratuité des billets d’avion pour l’ensemble des passagers d’une destination touristique.

Podcast sur l'avenir du transport aérien de passagers.

Écoutez l'article en podcast.

Le transport aérien de passagers est en danger.

Même si l’Association Internationale du Transport Aérien (Iata) est plutôt confiante concernant l’avenir du transport aérien international de passagers en raison des prévisions de hausse de trafic sur plusieurs années, la rentabilité des compagnies aériennes reste fragile et soumise à certains facteurs que nous allons étudier.

Vendre des billets d'avion ne rapportera plus rien.

Il est de plus en plus difficile d'être rentable en étant un simple transporteur aérien. C’est d’ailleurs pour cela que les compagnies aériennes ont créé la norme NDC : elles veulent vendre d’autres prestations associées. Certes, leurs résultats se sont améliorés depuis cinq ans mais principalement en raison de la baisse des cours du pétrole.

Or, elles ne maîtrisent pas ce poste de dépense très gourmand malgré des avions de plus en plus économes en carburant. Quand l'économie mondiale montre des signes d’essoufflement, les cours du brut baissent mais le marché aérien stagne car les gens voyagent moins en raison du manque de revenus et de l’inquiétude sur l’avenir. Vu la compétition exacerbée entre les différents acteurs, les prix et les marges baissent.

Quand l'économie mondiale va bien et a de bonnes perspectives, les cours du brut augmentent mais pas les marges des compagnies aériennes qui ne peuvent jamais répercuter entièrement la hausse des prix. Rappelez-vous que dans le transport aérien de passagers, les clients achètent d’abord un prix avant d’acheter une destination...

Fragilité des business model des compagnies aériennes.

Dès qu’une crise économique, sociale ou politique se déclenche, le secteur en subit immédiatement les conséquences, avec parfois à la clef, des faillites retentissantes. Or, par définition, ces crises sont difficiles à prévoir même sur le moyen terme ce qui rend difficile le pilotage d’activité.

Déjà, Iata revoit à la baisse ses prévisions de croissance mais pourrait tout aussi bien les revoir à la hausse dans quelques mois. D’ici vingt ans, le trafic mondial devrait doubler si la crise climatique n’amène pas les passagers à moins voyager, si les conditions économiques et politiques le permettent, etc. L'avenir du transport aérien de passagers est trop dépendant des économies mondiales.

Fin des compagnies aériennes milieu de gamme généralistes

Les facteurs clés de succès du transport aérien de passagers sont la maîtrise des coûts, le taux de remplissage des avions, les variations du prix du pétrole, les parts de marché gagnées ou perdues et le montant des recettes unitaires.

L'avenir appartient d’une part aux compagnies aériennes low-cost, déjà plus rentables que beaucoup de compagnies aériennes traditionnelles, qui transporteront à moindre coût d'énormes flux de passagers, et d’autre part aux compagnies aériennes très haut de gamme, type Emirates, qui transporteront des passagers prêts à payer cher des services à très haute valeur ajoutée.

Le milieu de gamme généraliste risque de péricliter sauf s’il se renouvelle, en particulier sur les courts et moyen-courriers.

Concentration probable dans l’aérien.

290 compagnies aériennes représentant 83 % du trafic aérien mondial de passagers, sont membres de l'Association Internationale du Transport Aérien. C'est beaucoup, car cela ne comprend pas la plupart des compagnies aériennes low-cost ou des compagnies charters.

Compte tenu des marges peu élevées et des coûts structurels importants, un phénomène de concentration est à prévoir car certaines compagnies aériennes historiques sont moins compétitives.

Il devrait donc y avoir moins de compagnies aérienne mais beaucoup plus puissantes, en particulier les low-cost qui ont déjà montré par le passé leur capacité à négocier des avantages (frais aéroportuaires, terminaux offerts, etc.) et à faire preuve d’adaptabilité.

Forte baisse du prix unitaire des billets d'avion.

Le trafic aérien mondial devrait augmenter environ de 3.6 % par an pour atteindre 7,8 milliards de passagers en 2035 contre 3,8 milliards en 2016.

Plus de passagers dans les avions, ce sont des coûts optimisés pour les compagnies aériennes qui en feront bénéficier leurs clients pour les attirer toujours en plus grand nombre. Conséquences : le prix des billets va continuer à fondre comme neige au soleil.

Le phénomène est déjà bien entamé : chez Ryanair par exemple, le prix moyen d'un billet est passé de 66 € en 2014 à 46 € en 2016. Michael O'Leary, le sulfureux patron de la compagnie aérienne européenne la plus rentable, a déjà annoncé des billets gratuits d'ici 5 à 10 ans.

Rotation des avions et fermeture de lignes aériennes.

Les compagnies low-cost ouvrent et ferment de nouvelles lignes aériennes plusieurs fois par an. Dès que les taux de remplissage ne sont pas atteints ou que d'autres lignes offrent plus d'opportunités, elles changent pour s'adapter à la demande. Bien entendu, la rotation des avions est optimisée pour qu'ils restent le moins longtemps possible au sol et que les coûts fixes soient divisés par le maximum de passagers.

Nous venons de le voir, les raisons de changer de modèle d’affaires pour les compagnies aériennes ne manquent pas. Certaines pourraient innover en adoptant un modèle gratuit pour les passagers, une forme de « Googlisation ».

Vers un transport aérien de passagers « Googlisé ».

Bien que cela puisse paraître surprenant, je trouve qu’il y a de nombreux points communs entre le transport aérien de passagers et le transport d’informations virtuelles pour peu que l’on regarde les choses avec un regard différent.

Google organise des flux virtuels.

Son moteur de recherche transporte gratuitement des clients virtuels, les internautes, vers des lieux virtuels, les sites Web et les applications mobile. L’entreprise de Mountain View excelle tellement dans ce domaine que d'innombrables sociétés acceptent de payer aux enchères ce flux très qualifié d’internautes pour vendre leurs produits ou leurs services.

Les compagnies aériennes organisent des flux réels.

Leurs avions transportent des clients réels, les passagers, vers des lieux réels, les destinations. Ces régions touristiques sont très motivées pour recevoir ces flux de passagers qualifiés. Aujourd'hui, les compagnies aériennes se rémunèrent sur la vente des billets. Demain, elles pourront gagner de l’argent d'une autre manière qui ressemblera davantage à la manière de faire de Google : l’utilisateur ne payera rien car d’autres le feront à sa place pour s’assurer de recevoir en priorité ce flux qualifié...

Aujourd’hui, le prix reste le facteur numéro un d’attractivité des compagnies aériennes. Demain, leur capacité à séduire les voyageurs grâce à leur qualité de service, leur ponctualité et les nombreux avantages qu’elles peuvent leur offrir seront leurs facteurs clefs de succès. Comme Google aujourd’hui qui dirige d’énormes flux d’internautes vers les sites et les applications qui acceptent de payer aux enchères des publicités ou du référencement naturel.

Reste à trouver les acteurs qui payeront les transporteurs aériens.

Qui va rémunérer les compagnies aériennes ?

Les modèles d'affaires qui ont fonctionné dans le transport aérien de passagers depuis trente ans risquent de disparaître à plus ou moins long terme. La mutation est déjà bien entamée avec le développement irrésistible des compagnies aériennes low-cost qui prennent chaque année, depuis vingt ans, des parts de marché aux compagnies aériennes traditionnelles.

Le succès grandissant des compagnies aériennes du Golfe qui misent sur le très haut de gamme, est l'autre versant de cette mutation même si rien n'assure aujourd'hui leur réussite future.

Plusieurs compagnies aériennes pourraient devenir des « Google aérien » qui trouveront dans leur formidable capacité à transporter d'énormes quantités de personnes d'un point A vers un point B, le plus gros de leurs futurs revenus.

Mais qui va donc payer les compagnies aériennes ?

Les institutionnels vont payer.

Le tourisme représentera de plus en plus un enjeu économique majeur pour les destinations touristiques où la concurrence fera rage entre continents, pays, régions, métropoles, villes. Pour se développer, une destination a besoin de liaisons aériennes directes depuis un lieu émetteur jusqu'à son territoire. Demandez aux responsables du tourisme en Provence-Alpes-Côte d'Azur-d'Azur ce qu'ils en pensent, eux qui se battent bec et ongles pour ouvrir des liaisons directes jusqu'à Marseille depuis la Russie, la Chine ou le Brésil !

Demain, cette tendance pourrait fortement s'accentuer. Les pays, les régions et les grandes métropoles paieront très chers les compagnies aériennes pour qu'elles acceptent d'ouvrir de nouvelles liaisons aériennes directes depuis des zones émettrices. Tout comme aujourd'hui les entreprises payent des milliards en publicité à Google ou à Facebook pour qu'elles acceptent d'amener les flux d'internautes vers leurs sites Web. On peut même imaginer un système d'enchères comme cela se fait actuellement en SEA où chaque destination pourra enchérir sur une autre pour faire venir un ou plusieurs avions jusqu'à elle pour une période plus ou moins longue.

Je crois cela possible car l'impact économique et social du tourisme sur les destinations sera nécessairement vital pour les commerçants, les hôteliers, les chambres d'hôtes, les musées, les artisans, les cafetiers, les restaurateurs, les vignerons, etc. Tous ceux qui ont besoin de clientèle à forte valeur ajoutée pour vendre leurs produits ou leurs services avec des marges leur permettant d'en vivre et de rentabiliser des investissements de plus en plus importants.

L'impact économique sur les territoires va inciter les décideurs politiques et économiques à tout faire pour séduire les organisateurs de flux de passagers. D'ailleurs, ce phénomène n'est pas nouveau : en France, depuis quelques années, de nombreuses régions ont pris à leur charge les frais d’infrastructure ou réduisent considérablement les taxes et les coûts afin d'attirer de nouvelles compagnies aériennes low-cost vers leurs aéroports. Marseille, par exemple, a construit le terminal MP2 dédié exclusivement aux compagnies aériennes à bas coûts.

De nombreux emplois ont pu être créés. Tout un écosystème se met en place et développe l'activité économique. Toujours pour rester compétitifs et attractifs, les aéroports supprimeront les taxes aéroportuaires aujourd'hui très (trop ?) élevées.

Les acteurs économiques vont payer.

À l'instar de Facebook ou Google, les compagnies aériennes détiendront de plus en plus de données concernant les passagers qu'elles transporteront. Ces datas, qui sont la denrée de l'économie de demain, permettront aux compagnies aériennes de vendre de la publicité et des informations ultra précises aux opérateurs touristiques de destination. Ceux-ci, toujours dans une logique d'acquisition et de transformation optimisées, paieront pour séduire des prospects dont les modes de vie, les goûts et les habitudes les inclinent à acheter des produits de plus en plus personnalisés.

Ce ne sont pas les canaux qui manqueront : smartphone des passagers, écrans géants à l'aéroport, écrans dans les avions, assistants personnels, etc. Sans compter tout ce que l'ingéniosité humaine va encore inventer en matière de numérique. Quand la compagnie aérienne saura que vous avez commandé du vin à bord, il lui sera facile de vendre l'information à des duty-free, des caveaux de dégustation, des bars à vins, à des guides œnologues, etc.

Le volume de touristes sera si important qu'il sera vital pour de très nombreux acteurs économiques locaux tout comme l'est aujourd'hui Google pour les entreprises du net.

Les passagers vont payer.

L’argent qu'ils ne dépenseront plus dans les billets d'avion, les touristes le dépenseront en services personnalisés voire à haute valeur ajoutée. Aujourd'hui, les compagnies aériennes low-cost vendent très bien des prestations payantes. Les compagnies aériennes classiques s'y mettent aussi : Alex Cruz, le président de British Airways, a expliqué lors d'une interview que ses clients acceptaient de mieux en mieux l'offre de restauration payante lancée à bord des vols court/moyen-courriers de la compagnie. Le traitement des données clients leur permet d'ajuster en temps réel l'offre à la demande et ainsi de répondre de manière plus personnalisée aux besoins des passagers.

Les voyages en avion vont s'automatiser.

C'est sans doute le point qui prendra le plus de temps car il rencontrera beaucoup de résistance. Après la voiture autonome, il y aura l'avion autonome, piloté par des intelligences artificielles. Le ciel, lui aussi, sera aiguillé par des robots intelligents qui pourront faire voler davantage d'avion en toute sécurité. Cette automatisation entraînera une baisse massive des coûts pour les compagnies aériennes. Nous prendrons beaucoup plus souvent l'avion car ce sera gratuit, sûr et rapide.

L’avenir du transport aérien.

Se transformer ou périr : tel semble être le destin des compagnies aériennes. Dans le passé, même le grand patron de la compagnie Air France, pourtant reconnu pour ses compétences, s’est planté en ne comprenant pas la révolution que représentaient les compagnies aériennes low-cost.

Dans quinze à vingt ans, vendre un simple parcours en avion pourrait ne plus suffire à assurer la pérennité économique des compagnies aériennes. Comme Google aujourd'hui sur le net, elles pourraient alors vouloir devenir des intermédiaires fiables et pertinents capables d’orienter dans un sens ou dans un autre des flux plus ou moins massifs de passagers. Leurs capacités à savoir le faire de manière optimale et à devenir des vecteurs incontournables pourraient leur assurer une sécurité économique importante. En revanche, si elles étaient tentées de ne rien faire et de continuer à dépendre de facteurs exogènes à leur activité (crises sociales et économiques, réglementations administratives, coût de l’énergie, etc.), elles pourraient tout simplement disparaître, en particulier en Europe, comme le soulignait déjà en 2013, le commissariat général à la stratégie et à la prospective.

Au-delà de la filière aérienne, ce sont tous les modes de transport (train, croisière, etc.) qui pourraient adopter ce modèle d’affaires. Même les sociétés d’autoroutes pourraient être concernées : on pourrait enfin réguler sans taxer le tourisme de masse afin de conjuguer rente économique et équilibres écologiques...