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Tourisme

Pourquoi faut-il revoir la garantie financière des agences de voyages ?

Portrait Gaillard Thierry

Thierry Gaillard - - Modifié le

La problématique des entreprises du tourisme est que la garantie financière des agences de voyages leur coûte très cher et protège mal leurs clients. Les récents évènements (faillite de Thomas Cook, Covid 19, etc.) ont montré les limites du système actuel qui ne fait face qu’aux faillites des petits opérateurs touristiques. Une autre solution répondant aux risques de défaillance du secteur dans son ensemble (compagnies aériennes, agences de voyages,etc.) est souhaitable.

Podcast sur la garantie financière des agences de voyages.

Écoutez l'article en podcast.

Diapositives sur la garantie financière des agences de voyages.

Qu’est-ce que la garantie financière des agences de voyages ?

Le décret n° 2015-1111, promulgué par le législateur, impose depuis le 1er octobre 2015 que tous les opérateurs de voyages et de séjours (tour opérateurs, agences de voyages, etc.) doivent souscrire auprès d’un organisme de garantie collective, d’un établissement de crédit ou d’une entreprise établis sur le territoire de l’UE ou l’EEE, une garantie financière totale des fonds déposés par les clients (particuliers).

Elle est indispensable pour obtenir l’immatriculation Atout France. Si l'un des professionnels participant à l’exécution du voyage est amené à déposer le bilan avant le départ ou pendant le séjour du client, celui-ci est intégralement remboursé par le fonds de garantie ou bien se voit proposer un voyage équivalent par un autre opérateur.

Cette mesure vise à améliorer la protection du consommateur en l'assurant de ne jamais perdre son argent même en cas de défaillance de l'un des professionnels. Elle fait partie intégrante du code du tourisme.

Comment avoir une garantie financière ?

Chaque organisme de garantie calcule le montant de la garantie financière à partir des bilans comptables de l’agence de voyage. Le montant, calculé agence par agence, dépend fortement de la nature des activités et du risque qu’elles représentent.

Par exemple, les groupistes ont traditionnellement un montant de garantie à payer plus important parce qu’ils représentent un risque plus grand. Dans tous les cas, l’ensemble des fonds déposés à l’agence par les clients sont garantis (absence de plafond).

Le montant se situe généralement entre 0,5% et 1,5% du volume d’affaires pour des agences ayant au moins trois bilans à leur actif.

Pourquoi La garantie financière actuelle est insuffisante ?

Les crises à répétition que subit depuis plusieurs années l’industrie du tourisme à travers la faillite de Thomas Cook et des compagnies aériennes XL Airways et Aigle Azur ou le confinement lié à la Covid 19, mettent en évidence les insuffisances du système actuel de garantie financière pour protéger les consommateurs et les entreprises. Quelles sont ces lacunes ?

  • Les clients sont traités différemment selon qu’ils achètent un billet sans prestations liées ou un billet dans le cadre d’un forfait touristique ce qui est totalement incompréhensible pour eux.
  • La chute d’un ou plusieurs gros acteurs du tourisme pourrait mettre en danger l’existence même de l’Association Professionnelle de Solidarité du Tourisme (APST) ou des autres garants (assureurs, établissements de crédit, etc.).
  • Elle impacte la compétitivité des entreprises du tourisme vis-à-vis de la concurrence et pénalise les jeunes entrepreneurs qui veulent lancer leur startup à cause du mécanisme de contre-garantie qui exige du patrimoine.
  • La garantie totale des fonds déposés, mesure spécifiquement française depuis 1992, est une aberration économique qui grève la compétitivité des entreprises françaises du tourisme.

Pourquoi votre agence de voyages est victime d’iniquité ?

La faillite de Thomas Cook met aussi en évidence une iniquité totale entre les différents acteurs du tourisme. En cas de faillite, les adhérents de l’APST prennent en charge le rapatriement des voyageurs et assurent le départ (ou le remboursement) de ceux qui ont déjà payé leur voyage mais ne sont pas encore partis.

L’APST mobilise ses membres pour trouver des solutions en prenant en charge financièrement le coût de l’opération. Ce système est sécurisant pour les clients puisqu’en passant par un professionnel détenteur de cette fameuse garantie financière, ils ne sont pas laissés seuls dans la nature même si l’agence de voyages qui leur a vendu le séjour a déposé son bilan. Connaissez-vous d’autres secteurs où c’est le cas ? Il y en a mais ils sont très peu nombreux. Malheureusement, cet aspect reste mal connu du grand public malgré plusieurs campagnes d’information.

Les chefs d’entreprise sont très souvent contraints d’avoir une contre-garantie, la plupart du temps en mettant leur patrimoine immobilier personnel en caution solidaire, afin de rembourser le fond de garantie quand les voyageurs auront été indemnisés. Et cela, tout au long de la vie de l’entreprise. En réalité, les fonds de garantie avancent l’argent mais ne paient pas à la place de l’entrepreneur. Une TPE ou une PME du tourisme qui n’a qu’un impact limité pour le fond de garantie peut entraîner la faillite personnelle de son dirigeant.

En revanche, lorsque l’on est un énorme opérateur touristique comme Thomas Cook, aucun dirigeant ne peut apporter de contre-garantie sur son patrimoine personnel en raison des sommes très élevées qui sont en jeu. Dans ce cas-là, et c’est ce qu’il semble s’être passé pour Thomas Cook, l’opérateur rédige une simple lettre de caution…

L’ardoise a donc été salée pour l’APST ! Par ricochet, elle l’a aussi été pour les entreprises membres de l’APST dont l’existence même était menacée par cet énorme préjudice. Nous sommes arrivés à cette situation parce que personne n’avait imaginé qu’un opérateur aussi puissant que Thomas Cook puisse un jour faire faillite. L’envoi des liasses fiscales chaque année pour contrôle par les experts-comptables des fonds de garantie, c’est seulement pour les petits, ceux qui ont payé la faillite de Thomas Cook...

Pourquoi créer un Fonds des Calamités et des Catastrophes ?

Pour trouver une réponse à cette question, nous devons partir à l’étranger.

Au Québec, les professionnels du tourisme ont créé en 2004 un « Fonds d’Indemnisation des Clients des Agences de Voyages », fonds alimenté directement par les consommateurs grâce à la perception d’une contribution de 0.1 % du montant de la facture. L’argent n’est pas conservé par les agences mais alimente un Fonds d’indemnisation des clients des agents de voyages (FICAV) géré par l’Office de la protection du consommateur. Si une prestation n’est pas délivrée au client, celui-ci peut s’adresser au FICAV et recevoir un remboursement y compris pour des frais supplémentaires qu’il aurait à payer sur place (nuit à l’hôtel, restauration, etc.). Les situations couvertes par ce fond sont nombreuses. Le montant du remboursement peut grimper jusqu’à 205 $ canadiens par jour et par personne ! Sans que cela coûte un centime aux professionnels du voyage.

125 millions de dollars canadiens ont été récoltés en quinze ans. Du coup, depuis le 1er janvier 2019, la contribution n’est plus payée par les clients car il a été estimé que son montant était suffisant pour faire face à de gros imprévus sans avoir besoin d’abonder davantage.

Ce fonds présente plusieurs avantages :

  • la marge des professionnels n’est pas impactée car la contribution est payée par les clients ;
  • le montant est indolore pour les clients compte-tenu du coût infinitésimal ;
  • les opérateurs du tourisme disposent d’un vrai avantage concurrentiel par rapport à leurs compétiteurs ;
  • la confiance envers les professionnels est renforcée ;
  • cela ne coûte pas un sou au contribuable.

Ce type de fonds existe aussi aux Pays-Bas où le système donne pleinement satisfaction. Le consommateur paie 2.50€ par dossier, et le voyagiste ou l’agence de voyages paient une cotisation annuelle. 90% de ceux-ci sont adhérents au « calamity fund ». Aux dernières nouvelles, la réserve du fonds était de 25 millions d’euros…

Raoul Nabet, un ancien président de l’APST, avait fait cette proposition qu’il appelait un « Fonds des Calamité et des Catastrophes », à priori approuvé par le ministère du tourisme en 2013 mais qui semble avoir été oublié depuis.

Lorsque la poussière sera retombée sur les difficultés actuelles du secteur, peut-être serait-il bon de la remettre sur la table.